En trois décennies, de nombreuses molécules ont été découvertes, qui permettent aujourd’hui aux malades de vivre. Mais malgré les nombreux investissements consentis et une mobilisation mondiale, le Graal du vaccin n’est pas atteint. Le VIH, qui cible précisément les cellules immunitaires habituellement sollicitées dans les réponses vaccinales, est beaucoup plus rapide que les défenses naturelles de l’organisme et hautement mutant.
Par ailleurs, personne ne guérit spontanément de ce virus, contrairement à la rougeole par exemple. Ces caractéristiques expliquent en partie pourquoi la mise au point d’un vaccin anti VIH représente un défi d’une complexité inédite.
Ce qui n’a pas empêché le milieu scientifique de réaliser des progrès considérables dans la recherche vaccinale. Ces dernières années ont été marquées par des échecs en termes de résultats, mais qui ont apporté des données intéressantes pour orienter la recherche.
Je pense à l’essai Thaï RV 144, avec une approche de vaccins combinés, qui a donné une efficacité extrêmement modeste – autour de 30 % de protection. Mais c’était la première fois que nous observions une protection chez un candidat vaccin ! Et à partir de ces données, d’autres progrès sont réalisés en recherche vaccinale.
Les approches combinées, qui réunissent des types de vaccins d’ordinaire utilisés séparément, ne sont pas nouvelles dans le VIH. Mais la production d’une réponse anticorps partiellement protectrice, piste écartée faute de résultats au début de l’épidémie, est une première.
Les chercheurs s’attachent donc à produire un candidat vaccin capable d’induire ces anticorps protecteurs. Les essais passés, qui ont aussi montré l’importance de la réponse immunitaire innée dans l’induction d’une réponse protectrice.
Nous tirons aussi l’espoir de l’évlolution des connaissances scientifiques et technologiques de ces 30 dernières années, qui permettent aujourd’hui à la recherche de progresser sur une base rationnelle scientifique. D’autant que le recul sur l’épidémie a également permis d’ouvrir des pistes au travers des rares individus résistant naturellement à l’infection (« exposés non infectés ») ou maitrisant naturellement le virus entré dans leur organisme (« contrôleurs naturels »). Ces « modèles » contribuent à apporter des clés de compréhension qui permettent à la recherche vaccinale d’avancer.
Si la recherche reste ainsi mobilisée sur un vaccin préventif, elle l’est aussi sur le vaccin thérapeutique. Ce dernier permettrait aux personnes infectées et traitées ou non par les trithérapies de mieux contrôler le virus ou ses conséquences sur l’organisme (comme l’inflammation chronique responsables des nombreuses complications de l’infection). Ce sont les enjeux, les défis, et les espoirs de cette quête scientifique que nous vous invitons à découvrir dans le dossier de ce numéro.
Pr Yves Lévy
Directeur scientifique du Vaccine Research Institute (VRI)
CHU Henri Mondor (Créteil)
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