Lancé en mars 2012, l’essai ANRS 12249 TasP (« Treatment as Prevention ») est l’un des quatre essais randomisés internationaux cherchant à évaluer l’efficacité de la stratégie du TasP au sein d’une large population. Il est mené en Afrique du Sud dans la province du KwaZulu-Natal, une des régions présentant l’une des plus fortes prévalences du VIH au monde et la plus élevée du pays (16,9 % en 2012 selon les dernières données nationales).
« Nous proposons aux habitants, de façon répétée (tous les six mois) et à leur domicile, un dépistage par test rapide du VIH », explique le Pr François Dabis (Institut de Santé Publique, Epidémiologie et Développement, Inserm U897, Bordeaux), un des co-investigateurs de l’étude. Selon le protocole de l’essai, certaines personnes identifiées comme séropositives se voient proposer une mise sous antirétroviraux immédiate, quel que soit leur niveau de lymphocytes CD4, tandis qu’à d’autres, la mise sous traitement est conseillée en dessous de 350 CD4, selon les recommandations nationales en vigueur en Afrique du Sud au moment de l’étude. Des cliniques mobiles ont été implantées localement pour faciliter l’accès aux soins des participants.
Les résultats présentés à la conférence de Melbourne portent sur la phase pilote de l’essai, qui a été mené auprès de plus de 12 000 personnes âgées de plus de 16 ans, suivies entre un an et 18 mois. Le statut sérologique de 9 000 personnes a pu être établi parce qu’elles se déclaraient séropositives ou parce qu’elles acceptaient le test de dépistage rapide. Le dépistage à domicile est bien accepté puisque le statut VIH a pu être identifié pour 82 % des personnes contactées. Parmi les personnes testées séronégatives au premier contact à domicile, 85 % ont accepté un second test de dépistage par la suite. Par ailleurs, la prévalence de l’infection par le VIH découverte dans cet essai, qui atteint les 31 %, est bien plus importante que celle estimée initialement.
Enfin, près de 25 % des 2 570 personnes identifiées comme séropositives l’ont appris grâce à l’étude. Par contre, et c’est un enjeu majeur, seules 48 % des personnes identifiées séropositives, qui n’étaient pas prises en charge dans une filière de soins lors du passage à domicile, se sont présentées en clinique dans les six mois (63 % dans l’année).
« Ces premiers résultats sont très importants, ils valident la première étape de la démarche TasP qui vise à tester et traiter l’ensemble d’une population adulte afin d’enrayer la transmission, indique le Pr François Dabis. Le dépistage rapide à domicile est très bien accepté et nous n’avons observé aucun frein majeur. Nous constatons simplement que les personnes nouvellement diagnostiquées séropositives ont besoin de temps pour entrer dans une démarche de soins, notamment quand elles se sentent en bonne santé. Cependant, une fois dans le système de soins, la prise d’antirétroviraux est bénéfique. » « La validation de la première phase de cet essai est une étape essentielle, déclare le Pr Jean-François Delfraissy, directeur de l’ANRS. Nous pouvons donc continuer l’essai. » La seconde phase a commencé en juin dernier. Les premiers résultats sur l'efficacité du traitement des personnes séropositives en termes de baisse des transmissions du VIH en population sont attendus pour fin 2016.